Modification de la délimitation des circonscriptions électorales fédérales en Gaspésie
Quels sont les critères utilisés pour établir les nouvelles limites des circonscriptions fédérales?
Le principal critère est la répartition égale de la population. La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorale exige que la population d'une circonscription dans une province corresponde, dans la mesure du possible, à la population moyenne d'une circonscription dans cette province (ce résultat s'obtient en divisant la taille de la population de cette province par le nombre de sièges attribués à cette province à la Chambre des communes).
Toutefois, en plus de la répartition égale de la population, les commissions doivent tenir compte d'autres facteurs sociaux et géographiques. Elles pourraient décider de créer des circonscriptions dont la taille de la population s'éloigne de la moyenne, si elles jugent cela nécessaire ou souhaitable pour :
- respecter les communautés d'intérêts ou l'identité des communautés (par exemple des communautés partageant la même langue, la même culture ou la même histoire);
- respecter l'évolution historique des limites des circonscriptions précédentes;
- faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste.
Les commissions doivent faire tout leur possible pour que l'écart entre la population d'une circonscription et la population moyenne des circonscriptions ne dépasse pas 25 %, sauf dans des circonstances extraordinaires.
Appui de Solidarité Gaspésie à l’opposition des députés suite au dépôt du rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Québec.
Madame Diane Lebouthillier, ministre du revenu national, et députée de Gaspésie—Les Îles-de-la-Madeleine, Québec
Madame Kristina Michaud, députée d’Avignon-La Mitis-Matane-Matapédia
Monsieur Maxime Blanchette-Joncas, député de Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques
Le 1er mars 2023, Madame la ministre et députée, Madame la députée et Monsieur le député, Par la présente, le regroupement citoyen Solidarité Gaspésie souhaite ajouter sa voix et appuyer la démarche des députés qui prendront position contre la proposition de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Québec.
Solidarité Gaspésie est un regroupement citoyen non partisan, qui fait la promotion d’un développement juste et respectueux du territoire gaspésien et de sa population. Depuis le début de la colonisation en terre d’Amérique, le territoire gaspésien et sa population ont été exploités sans contrepartie. On n'a qu’à penser au commerce de la Morue, aux changements profonds qu’ont connus les écosystèmes côtiers et forestiers de la péninsule et surtout à l’anémie de notre développement économique et social. Comme le décrivait si bien Mathias Rioux, ancien ministre québécois, dans sa thèse intitulée “La Gaspésie dans tous ses états.
On évoque, en conclusion, une réalité qui s'impose au-delà des théories et des modèles : la Gaspésie fut exclue du développement pendant près d’un siècle. Conséquemment, la région n’a pas connu de croissance élevée sur une période plus ou moins longue.
« Au moins ne pas faire obstacle! »
Nous, habitants de l’Est du Québec, par notre histoire et notre culture, demandons à être reconnus à juste titre dans nos particularités et nos spécificités. Nous avons fait face à tous les types de pauvreté auxquels nous avons été confrontés, que ce soit sur le plan de la scolarité, de l’économie, de l’emploi ou de la démographie. Notre vécu en tant que peuple a forgé notre solidarité, notre résilience et notre créativité. Nous demandons fort peu, simplement de ne pas faire obstacle à notre émancipation!
Nous prenons acte que la commission doit procéder au redécoupage à l'intérieur de certains délais et dans le respect des obligations que leur impose la loi. Ne pas faire obstacle, c'est aussi de s'assurer que la législation soit adaptée aux caractéristiques sociales du moment. Une proposition de modification de la loi devrait être inscrite dans son rapport.
Et ne pas faire obstacle passe par la conservation de notre représentation politique, par le maintien de nos voix à la Chambre des communes. Ne pas faire obstacle signifie aussi conserver un minimum de contact avec nos élus qui pallient aux carences d’une fonction publique fédérale anémique en milieu rural et faiblement urbanisé. Ne pas faire obstacle, c’est conserver la dimension actuelle des circonscriptions électorales adéquate pour livrer à l’ensemble de la population les services requis. Ne pas faire obstacle, c’est reconnaître la spécificité historique et culturelle des gaspésiens et gaspésiennes. Ne pas faire obstacle, c’est enfin, et pour le moins, maintenir le statu quo en ce qui concerne les quatre circonscriptions électorales de l’Est du Québec.
Cette reconnaissance est non seulement possible, mais prévue dans le cadre de la loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. La commission semble plus sensible aux calculs mathématiques qu’à la représentation politique de la population. Cette représentation est actuellement très variable entre les provinces du Canada. Elle passe de 121 527 personnes par circonscription en Ontario à 41 080 dans les quatre circonscriptions de l’Île-du-Prince-Édouard. Si cette situation est considérée comme étant “normale”, il est, dans ces conditions, concevable de questionner la primauté accordée par la Commission à l’égalité des voix, allant même jusqu’à resserrer la marge d’écart à la moyenne, la faisant passer de 25 % à 10 % selon son bon vouloir.
La démocratie représentative n’est pas de facto synonyme d’une quelconque égalité des votes. Elle se réalise tous les jours, par nos interactions avec nos élu-e-s. Elle se réalise aussi par le choix électoral d’une personne ou d’un parti politique à l’écoute de celles et ceux qui habitent un territoire. Réduire le nombre d’élu-e-s sur un territoire de la taille de la Gaspésie signifie inévitablement affaiblir la capacité de représentation démocratique. La proposition contenue dans le rapport de la commission ne tient-elle pas plus, en ce sens, du cynisme institutionnel que de celui des abstentionnistes?
Au nom des membres de Solidarité Gaspésie, nous appuyons sans réserve les député.e.s qui manifesteront leur opposition à la proposition de redécoupage des circonscriptions électorales présentée le 1er février 2023, ceci auprès du comité parlementaire désigné à cette fin. Le développement des régions du Québec, qui sont éloignées des centres de décisions, n'est pas chose facile, vous en conviendrez. Notre seule demande auprès des parlementaires dans ce dossier est “d’au moins, ne pas faire obstacle!”
Merci à l’avance pour l’énergie et la détermination que vous consacrerez au soutien de la représentation politique des gaspésiennes et des gaspésiens.
Carol Saucier, Pierre Michaud, Jean-Claude Plourde, Marie Hudon et Jacques Ouellet, membres de Solidarité Gaspésie
cc : MRC et municipalités qui ont participé aux consultations de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Québec en septembre 2022